La nécessaire réconciliation



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Réflexion sur la violence et le problème identitaire au Maghreb. Un ouvrage publié en Algérie en 2013 par les éditions Dalimen, ensuite en France en 2014 par UPblisher. Deuxième édition en 2017.

Dans mon ouvrage, j’évoque la question de la réconciliation des Maghrébins avec leur histoire, celle qui remonte notamment à la période avant l’islam et avant le Xe siècle (selon la légende, le Xe siècle représente la date de l’invasion hilalienne). Je parle de réconciliation, car une grande partie des Maghrébins rejettent, négligent et sous-estiment cette partie ancestrale de leur histoire comme si elle n’avait rien à leur raconter et comme s’ils avaient honte de ce qu’elle a à leur dire. Beaucoup préfèrent s’inventer d’autres histoires, ce qui montre que le problème est profond, car l’histoire d’un individu ou d’un peuple est une partie intégrante de sa personnalité et de son être. C’est ce que nous avons vécu dans le passé qui fait ce que nous sommes aujourd’hui. L’histoire raconte également nos origines et c’est pour cette raison que renier son histoire, c’est renier ses origines. Le grand historien maghrébin Ibn Khaldûn (prétendant lui-même être arabe) a soulevé ce phénomène au XIVe siècle déjà. Il affirme que les Berbères dénigraient leurs origines et préféraient s’inventer des origines arabes, phénomène qui continue aujourd’hui. Beaucoup de Maghrébins préfèrent se présenter comme étant Arabes et détestent qu’on leur rappelle qu’ils peuvent avoir un quelconque lien avec les Berbères, ce peuple qui a toujours occupé les terres du Maghreb. Pourtant, l’histoire raconte que les arabophones au Maghreb ne sont dans leur très grande majorité que des Berbères arabisés. La question ne concerne pas la langue que l’individu parle ou les origines. Personnellement, je trouve que toutes les langes sont belles du moment qu’elles nous permettent de nous exprimer librement et par là même permettent la créativité et l’épanouissement de la pensée. Le problème c’est que beaucoup de Maghrebins expriment un rejet à l’égard de leurs l’histoire qui est l’histoire de leur pays. Or, ne rejette son histoire et ne dénigre ses origines que celui qui a un problème avec son histoire ; cela dénote un mal-être profond et une relation complexe avec soi. Nous nous plaignons aujourd’hui de la violence qui mine nos sociétés. Je parle de la violence au quotidien que l’individu subit dans les rues, dans les lieux de travail et au sein de la famille. Je pense qu’il faut regarder du côté de la relation et de l’image que nous avons de nous-mêmes si nous voulons comprendre une grande partie de ce phénomène de violence. Assurément, celui qui se dénigre porte un regard identique sur ses semblables. La violence exercée contre l’autre se nourrit de ce mépris qu’il exprime à son égard. Lorsqu’on a de la considération pour l’autre ou qu’on le respecte, on s’interdit de le violenter. Je tiens à préciser que nous devons respecter toute personne justement pour la valeur humaine qu’elle porte en elle. Il est important de souligner également que celui qui se méprise, pense constamment que les autres ne lui reconnaissent pas sa valeur et le dénigrent. Ce sentiment, le fait souffrir et c’est généralement dans l’agressivité qu’il exprime sa douleur. Aussi, le désordre régnant dans l’espace public se nourrit-il de l’incapacité à s’estimer les uns les autres. Les pays du Maghreb peinent aujourd’hui à se construire. Pour sortir du sous-développement, il est nécessaire de prendre au sérieux ce mépris de soi car celui qui se dénigre perd également confiance en lui-même et par conséquent il a du mal à entreprendre. Ainsi, si on veut se libérer de beaucoup de nos douleurs, de notre agressivité et de nos difficultés à cohabiter et à nous faire confiance, il est nécessaire de nous réconcilier avec notre histoire donc avec nous-mêmes. Seule une bonne relation avec soi permet une bonne relation avec l’autre. ». “Toutefois, cette violence est à facettes multiples. Celui ou celle qui méprise ses origines porte un regard identique sur ses semblables. Il ou elle ne peut les respecter ni dans leur être, ni dans leurs biens, ni dans leur travail. La violence qu’on exerce contre l’autre se nourrit de ce mépris qu’on éprouve à son égard. Reconnaître à autrui sa valeur humaine, c’est s’interdire, tout d’abord, de le violenter ; c’est être correct avec lui et le respecter. C’est seulement en revalorisant notre propre image que nous pouvons revaloriser l’image de nos semblables à nos propres yeux. Ainsi, la violence généralisée, qui mine notre société, n’est pas seulement due à une conscience corrompue qui la moraliserait, mais aussi à une souffrance ancestrale causée par le manque d’estime de soi que les problèmes économiques et sociaux actuels accentuent.Il est temps d’en finir avec ce dénigrement. Il faut que les Algériens comme tous les Maghrébins fassent la paix avec eux-mêmes, car celui qui n’a pas une relation sereine et paisible avec lui-même ne peut pas avoir une relation sereine et paisible avec les autres. La condition première passe par une réconciliation avec leur histoire”. Extrait de l’entretien de Razika Adnani accordé au journal algérien Reporters

Extrait de l’ouvrage La nécessaire réconciliation

خصص الجزء الثاني من هذا الكتاب» المصالحة الضرورية» للمصالحة مع التاريخ التي هي ضرورية بالنسبة للكاتبة لأنها بالنسبة لها تمثل الشرط الأول للمصالحة مع الذات. إن التاريخ جزء من ذات الشعب وعامل من العوامل المركبة لهويته. المصالحة مع الذات شرط ضروري لبناء النفس وإقامة علاقة وئام واحترام وسلم مع الآخر. لأنه لا ينكر تاريخه و أصله بالتالي نفسه إلا من يحتقر تاريخه وب و أصله و التالي نفسه. والذي يحتقر نفسه لا يمكنه أن يقيم علاقة حسنه مع نفسه ولا مع الغير. فهو إما أن يحتقر نفسه أمام هذا الغير فيعجز عن بناء نفسه، إما أن يعتقد أن الغير يحتقره فيتألم وقد يعبر عن ألمه بالعنف وفي غالب الأحيان يستعمل ذلك عذرا لفشله. كذلك إن الذي يحتقر نفسه يحتقر من هم مثله فيسمح لنفسه بالاعتداء عليهم وعلى كرامتهم الإنسانية بممارسة العنف ضدهم. إن الصورة السلبية للكثير من الجزائريين عن أنفسهم هي السبب الأساسي للكثير من مظاهر العنف التي يعاني منه المجتمع الجزائري وسبب من أسباب عجزه عن بناء أنفسه.  لا يبني نفسه إلا من لديه ثقة في نفسه ولا تكون لشخص أو شعب ثقة في نفسه إلا إذا كانت له صورة إجابية عن نفسه.  إن المصالحة مع التاريخ لا بد أن تعم كل الجزائريين لأن هذا التاريخ هو تاريخ كل الجزائريين.

France culture

Disponible en version papier sur Amazon et sur le site de la Fnac


La nécessaire réconciliation est une réflexion sur le fléau de la violence. À l’heure où la violence touche toutes les sociétés, cet ouvrage présente une autre analyse des causes qui permettent à la violence de se généraliser, à travers un nouveau concept celui de « la moralisation de la violence ».Razika Adnani prend l’Algérie comme exemple pour construire sa pensée. Elle aborde la question de la légitimité de la guerre de libération et réexamine le principe de « la violence justifiée ». La question capitale est de savoir comment faire pour que la justification de la violence ne puisse jamais entraîner sa moralisation.
Mais la guerre suffit-elle, à elle seule, à expliquer le phénomène de la violence ? Razika Adnani croise causes historiques et sociologiques. Elle met en avant le rôle fondamental de l’éducation et pose la question de la modernité confrontée à la tradition, avec des exemples concrets tels que la justification du « voile » ou la pratique de « l’œil indiscret ». Enfin elle voit l’expression d’une souffrance, elle-même source de violence, dans le poids d’une histoire non assumée. Ainsi, elle nous entraîne au cœur des habitudes comportementales pour nous aider à comprendre comment certaines d’entre elles peuvent devenir le terreau de la violence. L’Algérie partage une culture et une vision de l’avenir avec les autres pays du Maghreb et les pays arabes et arabophones. Voilà qui permet de saisir des aspects importants du phénomène de violence sociale non seulement en Algérie mais aussi dans l’ensemble de ces pays.
Razika Adnani construit sa réflexion dans la perspective de savoir si une meilleure relation avec l’autre et un meilleur partage de l’espace sont possibles. Elle s’interroge sur la relation qui existe entre l’image que nous avons de nous-mêmes et la violence faite à autrui.

Editeur en France
UPblisher, 2014
Deuxième édition : UPblisher 2017
Langue : Français
ASIN: B00P07HFN8

L’éditeur : Stéfan Aimar

Dans la nécessaire réconciliation, Razika Adnani pose le problème du port du voile et de sa relation avec la violence au quotidien qui mine les sociétés musulmanes. Pour elle, le voile transmet un discours qui déshumanise l’homme. Il le présente comme une matière sans âme ou un animal guidé par ses instincts. Elle s’interroge si l’homme doit payer un tel tribut pour obtenir de la femme qu’elle se voile. Pour elle, s’il est indispensable que les Algériens comme tous les Maghrébins se réconcilient avec leur histoire pour construire des pays modernes et stables, il est indispensable qu’ils se réconcilient également « avec la morale, la vraie, celle qui met fin à la moralisation de la violence afin de s’interdire d’y recourir quelle que soit la situation. Cela n’est possible que si les hommes et les femmes se réconcilient avec leur humanité et cessent de la donner en gage pour satisfaire leurs désirs. Il faut que l’homme en finisse avec un discours qui le déshumanise.”

La nécessaire réconciliation a été publié en Algérie en 2013 par les éditions Dalimen

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