Razika Adnani – L’université française entre l’entrisme islamique et l’effondrement de son esprit scientifique


Chaque jour, la société française révèle à quel point sa fracture entre la droite d’un côté et la gauche de l’autre est profonde et comment les accusations et les invectives empêchent tout débat serein et installent la peur de s’exprimer. Il ne suffit pas dans une société que la loi reconnaisse la liberté d’expression pour que celle-ci s’exerce réellement ; il faut également que les citoyens l’acceptent et sachent la respecter. Quand cette dichotomie politique de la société intervient dans le monde de l’université et entrave la liberté d’expression, alors que l’université est le lieu où l’argumentation et le raisonnement devraient être les seuls moyens de débat et les seuls critères de vérité, on ne peut que s’ inquiéter. C’est le cas de l’intervention du syndicat Union étudiante Lille pour interdire la conférence de Florence Bergeaud-Blackler. À l’université, les idées doivent être opposées et confrontées à d’autres idées, c’est ainsi seulement qu’elles peuvent éclore.
La violence verbale ou physique n’a pas sa place à l’université
Cependant, cet événement n’est pas une raison pour présenter Florence Bergeaud-Blackler comme celle qui défend la liberté d’expression à l’université ou encore le débat académique scientifique et ouvert. Florence Bergeaud-Blackler ne répond à la critique académique de ses thèses que par des mensonges, des accusations, des attaques visant des personnes, des diffamations et de la violence verbale. La preuve en est sa réponse à ma critique académique de son ouvrage “Le frérisme et ses réseaux “.
Si aujourd’hui elle se plaint de ceux qui l’accusent d’être d’extrême droite, elle-même ne se gêne pas d’utiliser cette même accusation contre ceux qui critiquent ses thèses, comme on le constate dans cette tribune. C’est ce qu’elle a trouvé comme moyen pour défendre le fait qu’elle distingue, comme la très grande majorité des anthropologues et sociologues français, l’islam de l’islamisme que cette même école a défini comme étant l’islam politique. Distinction qui n’a aucun fondement ni historique ni théologique et qui ne peut émaner que d’une personne qui ignore totalement l’histoire de la pensée musulmane ou a le souci du politiquement correct. Dans mon ouvrage : Islam : quel problème? Les défis de la réforme, j’explique comment les musulmans ont opté pour un islam qui n’est pas dissocié de sa parie juridique dès les premiers siècles de l’islam.
Le moins qu’on puisse dire : un scientifique ne parle pas comme ça
Le moins qu’on puisse dire quand on lit ce que Florence Bergeaud-Blackler a écrit, c’ est qu’ un scientifique ne parle pas comme ça et ne doit pas parler comme ça. Un scientifique est tenu par les principes de l’esprit scientifique qui l’obligent à répondre aux critiques de ses idées par des arguments objectifs et non par des attaques visant les personnes, ni par des mensonges, ni encore par des tentatives de détourner les questions pour éviter d’y répondre. Assurément, un diplôme universitaire à lui seul ne fait pas un scientifique. Celui-ci doit également avoir un comportement et des valeurs morales, dont celle de ne jamais dissimuler la vérité pour satisfaire des intérêts personnels. Un scientifique, tenu par les principes de l’esprit scientifique, ne doit jamais mentir, car pour lui seule la vérité compte. Alors que, tout au long de sa tribune, Florence a délibérément menti à ses lecteurs.
Défendre les principes de l’esprit scientifique contre toute personne qui les piétine
Ces méthodes, dont l’objectif est d’étouffer tout débat académique contradictoire, doivent être également dénoncées vu le mal qu’elles peuvent provoquer à la recherche scientifique, notamment en France, pays de Descartes, de Claude Bernard, de Gaston Bachelard et de Durkheim. Ce sont des méthodes qui portent atteinte à l’université française tout autant que les étudiants qui veulent interdire des conférences ou des cours pour des raisons politiques. L’université française n’est pas menacée uniquement par l’entrisme islamique, mais également par l’effondrement de son esprit scientifique et de sa rigueur académique qui ont hier contribué à faire son prestige.
Défendre l’université française, c’est défendre les principes de l’esprit scientifique contre toute personne qui les piétine, et cela sans aucune distinction. Défendre le débat académique, c’est ne jamais accepter qu’il soit entravé par des interdictions ou encore des violences physiques ou verbales. Défendre la recherche scientifique, c’est aussi laisser ceux qui ont les compétences dans leur domaine juger la valeur de telle ou telle thèse ou théorie, et le domaine de l’islam ne doit pas faire exception à cette règle.
Pour terminer, je rappelle que les islamistes et particulièrement les Frères Musulmans ont décidé au début du XXe siècle, pour contrer toute réforme de l’islam et des sociétés musulmanes, que l’islam ne posait aucun problème et que si problème il y avait, il était dû aux musulmans et non à l’islam. Ils ont ainsi mis l’islam à l’abri de tout regard critique et placé tous les problèmes en dehors de l’islam. Les Universitaires français, dont fait partie Florence Bergeaud-Blackler, ont répété fidèlement ce discours. Ils ont eux aussi décidé que le problème, c’était l’islamisme ( l’islam politique) qui n’avait rien à voir avec l’islam et placé de ce fait tous les problème en dehors de l’islam. Leur conception de l’islamisme a été le meilleur soutien des islamistes contre les modernistes dans le monde musulman. En Occident, cela leur a permis de s’imposer tranquillement au sein de la société.
Razika Adnani